Examen bactériologique d'une prélèvement oculaire

Plan du chapitre

1 - Contexte

1 - Infections oculaires

2 - Examen préopératoire

2 - Objectifs

3 - Prélèvements

4 - Transport

5 - Examen direct

6 - Culture et antibiogramme

1 - Prélèvements préopératoires

2 - Autres prélèvements

3 - Antibiogramme

1 - Contexte

Le laboratoire de microbiologie est amené à intervenir dans le diagnostic des infections oculaires

à deux niveaux :

* isoler l'agent causal d'une infection avérée

* participer à la prévention des infections post-opératoire en étudiant la flore conjonctivale.

 

1 - Infections oculaires

Deux éléments du contexte de la survenue des infections oculaires sont déterminants pour définir

la marche à suivre au laboratoire :

* la localisation de l'infection

* le contexte épidémiologique de survenue de cette infection.

- Localisations

Les infections oculaires s'observent :

* au niveau du segment antérieur

- conjonctivites

- kératites

- uvéites antérieures ou iridocyclites

* au niveau du segment postérieur

- choriorétinites et rétinites

- endophtalmies et panophtalmies, véritables urgences médico-chirurgicales

- infections périoculaires.

- Contexte épidémiologique

L'étiologie des infections oculaires peut varier avec :

- le terrain : âge, immunodéficience,

- l'origine géographique du patient,

- séjours en zones d'endémie filarienne.

 

2 - Examen préopératoire

L'examen bactériologique pré-opératoire est basé sur le fait qu'un pourcentage important des infections

après chirurgie du globe oculaire se développe à partir des bactéries présentes sur la conjonctive avant

l'intervention.

 

2 - Objectif s

L'examen bactériologique d'un prélèvement oculaire va :

* apporter le diagnostic étiologique de l'infection en isolant et identifiant l'agent bactérien ou

mycosique responsable,

* guider la thérapeutique,

* prévenir les infections postopératoires.

Les principaux agents potentiellement pathogènes à mettre en évidence sont regroupés dans les tableaux

ci-après

 

Tableau 1 : Bactéries habituellement isolées dans les prélèvements conjonctivaux préopératoires

 

 

Potentiellement Staphylococcus aureus, Streptococcus pneumoniae,

Bactéries à Gram + pathogènes Enterococcus faecalis

Commensaux Staphylococcus epidermidis, Corynebacterium sp,

Propionibacterium acne, Streptococcus spp

Potentiellement Entérobactéries (Serratia, Klebsiella, Proteus, Enterobacter)

Bactéries à Gram - pathogènes Pseudomonas aeruginosa, Haemophilus, Moraxella,

Acinetobacter

Commensaux Moraxella catarrhalis, Neisseria spp

 

 

 

Tableau 2 : principaux micro-organismes responsables d'infections oculaires

Localisations Contexte habituel (ou par défaut) Contextes particuliers

Conjonctivite S, aureus, S. pyogenes, S. pneumoniae, Adulte inimunodéprimé

H. influenzae, N. gonorrhoeae, Pseudomonas, Entérobactéries, levures Entérobactéries, Moraxella spp Nourrisson et petit enfant: N. gonorrboeae, S. aureus, S. pyogenes, C. trachomatis,

P. aeruginosa.

Afrique et pays en voie de développement : M. tuberculosis, C. diphtheriae, N. gonorrhoeae,

Haemopbilus aegyptius. Chlamydia trachomatis.

Cellulite S. aureus, S. pneumoniae, Enfant < 5 ans. H. influenzae

orbitaire aiguë P aeruginosa, S, pyogenes Immunodéprimé ou diabétique bactéries anaérobies et levures

Cellulites en plus des germes ci-dessus :

orbitaires chroniques Mycobacteilum, Nocardia, Actinomyces,

Aspergillus.

Dacryoadénites Aiguë : S. aureus, S. pyogenes, Chroniques : Nocardia, M. tuberculosis. et dacryocystites S. pneumoniae, H. influenzae. M. Ieprae, T. pallidum, levures

Canaliculite Propionibactérium propionicus

Blépharites S. auréus et surtout S. epidermitidis, Demodex

parfois Moraxella spp,

Kératites S. aureus, S.pneumoniae, Porteurs de lentilles : amibes libres

P. aeruginosa, Klebsiella, Enterobacter, Acantbamoeba, Naegleria

Serratia, Citrobacter, Proteus.

Parfois : mycobactéries atypiques,

levures, Aspergillus.

Endophtalmies Mêmes germes que les kératites,

avec en plus Neisseria meningitidis,

Bacillus cereus, entérocoques, SCN et certaines levures.

 

3 - Prélèvements

Les prélèvements bactériologiques oculaires concernent essentiellement les prélèvements conjonctivaux :

* soit pour un examen préopératoire, le prélèvement doit alors être réalisé immédiatement avant

l'intervention chirurgicale

* soit pour diagnostiquer une conjonctivite, le prélèvement sera effectué :

- avant toute toilette faciale

- au niveau de l'angle interne de l'oeil

- avec un tampon stérile monté très serré

Plus rarement le prélèvement sera demandé dans le cadre :

* d'une blépharite; on prélèvera alors les croûtes palpébrales et un ou deux cils à la pince à épiler stérile.

* d'un orgelet qui sera ouvert avec un vaccinostyle stérile pour prélever le pus (à la pipette ou à l'écouvillon).

* d'une dacryocystite qui demande un recueil du pus au niveau des points lacrymaux palpébraux

après pression sur les sacs lacrymaux;

* d'un ulcère de cornée, le prélèvement est alors effectué avec un coton monté après anesthésie locale.

Les prélèvements intra-oculaires ou péri-orbitaires ainsi que les trois derniers sont du domaine de l'ophtalmologiste.

4 - Transport

-

Chaque fois que l'examen ne peut être fait extemporanément un milieu de transport adapté au contexte

devra être utilisé :

* milieu pour Chlamydia,.

* milieu de type Stuart pour les autres bactéries.

5 - Examen direct

L'examen direct n'a pas d'intérêt pour les prélèvements avant chirurgie oculaire.

Pour les autres prélèvements, deux frottis peuvent être réalisés :

- le premier pour la coloration de Gram qui permettra de décrire la flore dominante;

- le deuxième pour une coloration de Giemsa à partir de laquelle l'aspect cytologique sera

étudié, en particulier la présence de polynucléaires.

D'autres frottis pourront être réalisés selon le contexte clinique et épidémiologique :

* pour mettre en évidence Chlamydia trachomatis par immunofluorescence, selon le contexte

épidémiologique;

* ou à l'état frais, des amibes libres chez les porteurs de lentilles cornéennes.

 

6 - Culture et antibiogramrne

1 - Prélèvements pré-opératoires

L'objectif est de mettre en évidence les bactéries pathogènes présentes dans 25 à 30 % des cas :

- les bactéries à Gram positif sont les plus fréquentes (75 à 80 %): Streptococcus pneumoniae, Staphylococcus aureus, Enterococcus faecalis;

- de nombreuses bactéries à Gram négatif, surtout des Entérobactéries peuvent être responsables de conjonctivites : Proteus, Enterobacter, Serratia, Klebsiella, Pseudomonas aeruginosa,

Haemophilus, Moraxella spp et Acinetobacter.

Chez les porteurs de lentilles cornéennes les fréquences sont inversées : les bactéries à Gram négatif prédominent.

Les bactéries de la flore commensale, parfois très importante, n'ont que peu d'influence sur la conduite à tenir, sauf chez le sujet immunodéprimé : Staphylococcus epidermidis, Corynebacterium spp,

Propionibacterium acnes, Streptococcus spp, Moraxella calarrhalis, Neisseria spp.

* Antibiogramme

L'antibiogramme ne sera réalisé que sur les bactéries potentiellement pathogènes.

2 - Autres prélèvements

L'ensemencement des prélèvements recueillis au cours des infections oculaires doit permettre l'isolement

des agents listés dans le tableau n° 1 :

* habituellement on utilisera des géloses au sang et au sang cuit, incubées sous CO 2 à 35 °C.

* D'autres milieux peuvent être utilisés, en fonction du contexte clinique et épidémiologique :

- Les cultures cellulaires pour isolement de chlamydiae trachomatis;

- Un bouilon anaérobie et une gélose au sang en anérobiose;

- Un milieu de Sabouraud, incubé entre 22 et 30 ° C pour les levures et aspergillus;

- Des milieux de culture pour Mycobactérium et Nocardia, pendant 8 semaines à 35 ° C, sous CO 2;

- Des milieux de culture pour amibes libres.

 

* Résultats attendus

* Conjonctivites

Sujet sain adulte : Staphylococus aureus, Streltococcus pyogenes, Haemophilus influenzae, Neisseria gonorrhoeae, Entérobactéries, Moraxella spp.

Adulte immunodéprimé : Pseudomonas, Entérobacteriaceae, levures.

Nourrisson et petit enfant : Neisseria gonorrhoeae, Staphylococcus aureus, Streptococcus pyogenes,

Chlamydia trachomatis, Pseudomonas aeruginosa.

Contexte épidémiologique particulier :

( Afrique et pays en voie de développement)

- Mycobacterium tuberculosis, Corynebacterium diphteriae, Neisseria gonorrhoeae, Haemophilus aegypticus.

- Chlamydia trachomatis est responsable du trachome (sérotypes A,B, et C) et de la conjonctivite à inclusions

( séroypes D et K). Seul l'examen direct ou la culture permettent le diagnostic; la sérologie est le plus souvent

en défaut.

* Autres infections oculaires

Cellulites orbitaires aiguës : S. aureus, S. pneumoniae, P. aeruginosa, S. pyogenes,

- chez l'enfant de moins de 5 ans : H. influenzae ;

- chez le patient irnmunodéprimé ou diabétique : bactéries anaérobies et levures. pr‚lŠvements

Cellulites orbitaires chroniques, rares, post-chirurgicales :

en plus des germes ci-dessus : Mycobacterium, Nocardia, Actinomyces, Aspergillus.

Dacryoadénites et dacryocystites :

- Les glandes lacrymales sont rarement l'objet d'infections aiguës, le sac lacrymal peut s'infecter à la suite d'un blocage de l'écoulement des larmes :

- On isole : S. aureus, S. pyogenes, S. pneumoniae, H. influenzae ;

- Infections chroniques : Nocardia, M. tuberculoses, M. leprae, T pallidum et certaines levures.

Canaliculites :

Infections, surtout chroniques, de l'orifice lacrymal et des canalicules, dues en majorité à Propionibacterium propionicus.

Blépharites :

Rares, dues à S. aureus et surtout S. epidermidis, parfois Moraxella spp.

Kératites

- Possibilité de mise en évidence d'amibes libres à l'examen direct, en particulier chez les porteurs de lentilles ;

- Bactéries les plus souvent en cause :

S. aureus, S. pneumoniae, P. aeruginosa, Klebsiella, Enterobacter, Serratia, Citrobacter, Proteus ;

- Parfois : mycobactéries atypiques, levures, Aspergillus.

Endophtalmies

D'origine endogène ou exogène (post-chirurgicales ou après blessure)

Mêmes germes que les kératites, avec en plus : Neisseria meningitidis, Bacillus cereuset certaines levures.

3 - Antibioqramme

Les antibiogrammes seront réalisés sur les germes potentiellement pathogènes : les antibiotiques étudiés sont

limités.

 

 

Bibliographie

LIOTET S. - Les prélèvements bactériologiques au niveau de l'oeil

- La Revue du Praticien, 1983, XXXIII, 37, 1947-1949.

FLANDROIS J.-P., CHOMARAT M. - L'examen bactériologique des prélèvements oculaires

- Bactériologie MédicalePratique, 1987.

SALVANET-BOUCCARA A., FORESTIER F., COSCAS G., ADENIS J.P., DENIS F.

Endophtalmies bactériennes, J. Fr. OphtalmoI., 1992, 15 : 669-678.

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