HYPOGLYCEMIES DE L'ADULTE

 

Introduction

Suggéré par la clinique, le diagnostic d'hypoglycémie est un diagnostic biologique grâce au dosage de la glycémie. L'hypoglycémie correspond à la baisse du glucose sanguin en dessous du niveau normal (< 2,9 mM/l) posant un problême de diagnostic étiologique.

Physiopathologie

La glycémie chez un homme normal fluctue entre 0.8 g/l (4.4 mM/l) aprés le jeûne nocturne et 1.2 g/l (6.7 mM/l) aprés chacun des repas.

La glycémie est maintenue constante malgré les modifications:

- du régime alimentaire

- de l'activité physique

Il existe un système complexe de régulation qui intègre:

- des messages neurologiques

- des contrôles hormonaux et cellulaires

Ce système a comme finalité la consommation en glucose du sytème nerveux central.

Au niveau cérébral:

- les besoins énergétiques sont de l'ordre de 600kcal/jour, couverts principalement par l'oxydation du glucose, parfois par les corps cétoniques

- le stock de glycogène cérébral est trés faible avec 10 minutes d'autonomie

- importance de l'apport constant de substrats par le courant sanguin

- utilisation globale de glucose constante aux environs de 70mg/min

- le transport de glucose à travers la barrière hémato-céphalique est modulée par le niveau glycémique. Il est diminué lors d'une exposition prolongée en hyperglycémie.

Les symptômes d'hypoglycémie peuvent être attribués soit:

- à la carence en glucose des cellules nerveuses (neuroglucopénie)

- à la réaction neuro-hormonale mettant en jeu le glucagon, les catécholamines, le cortisol, et l'hormone de croissance.

Chez le non-diabétique il existe un parallélisme grossier entre la profondeur de l'hypoglycémie biologique et l'intensité des signes cliniques

Chez le diabétique, la sensation d’hypoglycémie est liée à l’ancienneté du diabète, à la fréquence des hypoglycémies, à la vitesse de variation glycémique

Signes cliniques

Les signes fonctionnels de début associent:

- fringales et faim douloureuse

- tachycardie, perception des battements cardiaques

- sudation importante, sensation de tremblement intérieur

- perceptions sensorielles variées (éblouissement, diplopie, acouphènes)

- asthénie, vertiges, céphalées et troubles de l'humeur.

L'hypoglycémie peut se manifester par des signes cliniques plus importants.

- manifestations neurologiques et psychiatriques:

- déficits moteurs,

- troubles de conscience, état pseudo-ébrieux ou confuso-onirique

- coma convulsif.

- manifestations cardio-vasculaires:

- hypotension artérielle

- angine de poitrine chez un sujet présentant une insuffisance coronarienne

- complications aigues:

- oedème cérébral, oedème aigu du poumon

- crises comitiales (l'hypoglycémie abaisse le seuil épileptogène du cerveau)

- séquelles neurologiques: déficits moteurs, états démentiels, épilepsies

Biologie

Le diagnostic biologique repose sur la glycémie veineuse en phase aigue (les glycémies capillaires risquent de sous-estimer les glycémies)

En fonction de l'étiologie, se discuteront :

- des mesures d'insulinémies, de C-peptide

- des tests dynamiques: régime de Conn ou test au glucagon IV

Formes étiologiques

A. Chez l'adulte

1) Hypoglycémies avec hyperinsulinisme

Causes Iatrogènes

a) diabétiques insulino-dépendants

le diabétique est exposé aux hypoglycémies du fait:

- des variations d'absorption de l'insuline exogène liées :

- de la carence du système contre-régulateur liée à la neuropathie autonome

déficit en glucagon et en catécholamines

les hypoglycémies sont moins bien perçues pour des niveaux de

glycémie plus faibles

- de l'insulinothérapie intensive

- du passage d'une insuline animale à l'insuline humaine

- d' une mauvaise alimentation, notamment aprés l'exercice physique

Les accidents hypoglycémiques doivent être prévenus:

- par un dépistage systématique

- en baissant les doses de l'insuline qui agit au moment de l'effort

- en prenant une collation comportant des hydrates de carbone et en particulier des sucres lents avant et aprés l'effort

D'autres causes peuvent être observées: excès involontaire d'insuline, grossesse, insuffisance rénale, anticorps anti-insuline (rôle discuté)

b) diabétiques non-insulinodépendants

Un surdosage en sulfamides s'observe fréquemment, en particulier:

- lors de l'utilisation de sulfamides à demi-vie prolongée chez le sujet agé

- en présence d'une insuffisance rénale

c) hypoglycémies factices

Ce diagnostic doit être suspecté dès que le malade peut avoir accès de part sa profession ou son entourage personnel, à des thérapeutiques hypoglycémiantes.

En cas d'injections répétées d'insuline, le diagnostic est fait devant l'association:

- d'hypoglycémies

- de valeurs élevées d'insulinémie

- de valeurs de C-peptide effondrées

- d'une positivité des anticorps anti-insuline en cas d'utilisation prolongée

L'ingestion factice de sulfamides hypoglycémiants:

- souvent de diagnostic plus difficile

- présence de taux élevés à la fois d'insuline et de C-peptide

- diagnostic formel établi par le dosage sérique du sulfamide incriminé

Causes organiques

Les insulinomes

- étiologie à rechercher mais rare

- signes d'abord discrets et intermittents

- parfois déclenchés par l'omission d'un repas ou aprés un exercice musculaire

- manifestations cliniques trés polymorphes, mais améliorées par l'absorption de sucre

- examen clinique souvent normal

Le diagnostic biologique repose sur:

- des glycémies inférieures à 0.5 g/l (2.8 mM/l).

- des insulinémies élevées, non freinables par l'hypoglycémie

- un rapport insulinémie (µU/ml) / glycémie (mg/dl) > 4

- Des tests dynamiques sont parfois nécessaires:

Tests de stimulation, parfois dangereux du fait d'une réponse exagérée d'insuline:

- glucagon IV

- Tolbutamide IV

Test de freinage:

- absence de réduction du C-peptide lors d'une hypoglycémie induite par la perfusion d'insuline exogène

- épreuve de Conn (régime hypocalorique sur 3 jours suivi d'un jeûne total)

hyperinsulinisme non freinable

valeurs pathologiques dans 80% des cas à la 24°h

dans 100% des cas à la 72°h

Le diagnostic topographique pré-opératoire:

- est souvent décevant du fait d'un diamêtre de la tumeur inférieur à 15mm

- n'est possible que dans 60% des cas

- peut s'effectuer:

Le diagnostic topographique per-opératoire :

-s'effectue par la palpation

- intérêt de l'échographie

- parfois dosages étagés d'insuline nécessaires

L'exérèse de la tumeur s'accompagne d'une franche élévation de la glycémie, avec parfois un diabète transitoire de quelques heures.

Le plus souvent de nature bénigne, les insulinomes peuvent être des tumeurs malignes dans 10% des cas, avec souvent des métastases hépatiques. Le diagnostic histologique de malignité est difficile.

L'existence d'un insulinome impose la recherche d'autres endocrinopathies associées dans le cadre d'une polyadénomatose de type I (MEN I):

- adénomes parathyroidiens

- adénomes hypophysaires

- tumeurs pancréatiques (gastrinome, VIPome).

2°) Hypoglycémies sans hyperinsulinisme au cours du jeûne

a) alcool

L'alcool inhibe la néoglucogénèse hépatique expliquant la survenue d'hypoglycémies aprés la disparition des stocks de glycogène.

b) Tumeurs hypoglycémiantes extra-pancréatiques

Tumeurs mésenchymateuses, hépatomes, corticosurrénalomes peuvent être associés à des hypoglycémies. Ces tumeurs peuvent sécréter de l'IGF-II.

c) affections hépatiques limitant la néoglucogénèse et la glycogénolyse comme les formes fulminantes de l'hépatite virale, cirrhoses, hépatomes, hépatectomies, métastases hépatiques, insuffisance hépatique évoluée.

d) déficit des hormones contre-régulatrices: insuffisance surrénale périphérique (Addison), hypopituitarisme avec déficit en cortisol ou en GH.

e) médicaments

Plus rarement que l'insuline ou les sulfamides hypoglycémiants, certains médicaments peuvent s'accompagner d'une hypoglycémie comme les salicylés à fortes doses.

3°) Hypoglycémies post-prandiales réactionnelles

Pouvant survenir précocément (2-3hrs) ou tardivement (3-5hrs) aprés un repas, elles correspondent à une vidange trop rapide de carbohydrates dans l'intestin grêle responsable d'un hyperinsulinisme.

Il existe plusieurs étiologies:

- gastrectomies avec dumping-syndrome :

- hypoglycémies réactionnelles liées à l'absorption de sucres rapides:

- surviennent le plus souvent chez des sujets anxieux, au cours du stress, dans le cadre de nombreuses plaintes fonctionnelles.

- examen clinique et bilan biologique général normaux.

- la glycémie à la 5° heure d'une HGPO peut être abaissée

Le traitement consiste dans des mesures diététiques simples associées à un traitement anxiolytique.

- hypoglycémies tardives au cours du prédiabète de type II: