Examens bactériologiques des liquides de ponction
( liquides de séreuses infectées )
Plan du chapître
1. Contexte
2. Objectifs
3. Prélèvement et transport
1. Examen direct
2. Cultures
3. Interprétation des cultures
1 - Contexte
L'infection de liquides internes normalement stériles amène souvent une morbidité et une mortalité élevées.
En conséquence la mise en oeuvre de méthodes bactériologiques efficaces et performantes doit permettre l'isolement et la caractérisation des espèces bactériennes en cause afin de permettre une meilleure prise en charge thérapeutique du patient.
Les bactéries susceptibles d'être isolées dans ces liquides sont diverses et imprévisibles, elles appartiennent à toutes les catégories bactériologiques : aérobies, aéro-anaérobies facultatives, anaérobies strictes. Ces bactéries ne posent pas de difficultés de culture, ces sites normalement stériles peuvent être infectés par une ou plusieurs espèces auxquelles il faut ajouter les mycobactéries en recherche spécifique (mais qui n'est pas envisagée ici).
La difficulté principale rencontrée est celle des bactéries commensales (ou supposées telles) de la peau ou des
muqueuses pouvant apparaître comme des contaminations du prélèvement mais dont il faudra discuter l'origine en fonction du contexte clinique et de la qualité du prélèvement.
2 - Objectifs
Il faut faire le diagnostic d'une infection dans un site normalement stérile ou dans lequel une infiltration a
amené un épanchement liquidien pouvant héberger des bactéries susceptibles de s'y multiplier.
Les liquides internes concernés :
1. Liquide de ponction articulaire ou synoviale
2. Liquide pleural
3. Liquide péritonéal
4. Liquide d'ascite
5. Liquide péricardique
6. kyste (ex. kyste pilonidal)
Toutes les bactéries doivent être recherchées, certaines plus spécifiquement :
dans un liquide articulaire : N. gonorrhoeae; dans un contexte d'arthrite septique la recherche
de Borrelia burgdorferi par amplification génique in vitro est à envisager selon des procédures particulières.
Quelques exemples non limitatifs d'isolements possibles dans certaines infections
Suppuration hépatique (souvent plurimicrobiennes)
Enterobactcriaceae
Anaérobies
Streptococcu s milleri
Staphylococcus aureus
Enterococcus spp
Péritonite primitive
Streptococcus pneumoniae
Escherichia coli
Péritonite secondaire (perforation d'organe creux, infections biliaires ou abcès)
Enterobacteriaceae
Anaérobies
Enterococcus spp
Ascite infectée (cirrhotique)
Entérobacteriaccae
Streptocoques
Anaérobies
Enterococcus spp
Suppuration intestinale
Yersinia pseudotuberculosis
Yersinia enterocolitica
Salmonella spp.
Streptococcus milleri
Péritonite post-chirurgicale
Enterobacteriaceae
Enterococcus spp
Anaérobies
Pleurésie
Streptococcusp pneumoniae
Staphylococcus aureus
Haemophilus influenzae
Anaérobies
Ostéomyélite de l'enfant
Staphylococcus aureus
Ostéomyélite et spondylodiscite
Staphylococcus aureus
Enterobacteriaceae
Pseudomonas aeruginosa
Arthrite aiguë
Staphylococcus aureus
Neisseria gonorrhoeae
Enterobacteriaceae
Streptococcus spp.
Haemophilus s influenzae
Borrelia burgdorfer
Pseudomonas aeruginosa
Infection sur prothèse articulaire
Staphylococcus aureus
(multirésistants)
Stapbylococcus aureus
Staphylococcus à coagulase négative
Peptostreptococcus
3 - Prélèvements et transport
Produit | Mode de prélèvement | Transport | Commentaire |
---|---|---|---|
Liquides internes divers
(liquide péricardique, pleural, abdominal, ariculaire, ponctions diverses | * Conditions anaérobies : seringue sans bulle d'air bouchée stérilement et hermétiquement ( supérieur ou égal à 3ml ) * Ajouter un tube stérile normal
| < 30 mn 20 °C |
Associer deux hémocultures réalisées avant traitement |
Pour la recherche de gonocoque, utiliser le milieu de Stuart gélosé. Pour ces liquides, les prélèvements à l'aide d'écouvillons secs sont à déconseiller formellement. Il faut obtenir une quantité de liquide suffisamment importante pour réaliser l'ensemble des examens bactériologiques et disposer d'un inoculum bactérien adéquat
car dans ces liquides, celui-ci peut être faible au départ de l'infection. Il faut également des précautions d'asepsie rigoureuse pour éviter une contamination par la flore commensale cutanéo-muqueuse. On peut privilégier la culture seule en inoculant directement un flacon de type hémoculture (méthode qui n'était pas recommandée jusqu'à présent mais qui s'avère efficace lorsque le volume et la quantité de bactéries sont faibles).
1 - Examen direct
Il est important dans ces liquides présumés stériles.
Deux approches sont possibles :
* la quantité de liquide obtenu est faible (ou les ponctions de kystes) : réaliser une coloration de Gram;
* la quantité est suffisante: réaliser une numération des éléments figurés puis une formule après cytocentrifugation et coloration cytologique (pour les cellules non identifiées : leur détermination
est du domaine de la cyto-pathologie), réaliser une coloration de Gram.
2 - Cultures
La centrifugation des liquides internes présumés stériles est préconisée par certains (1500 g x 30 min).
Il ne faut néanmoins pas perdre de vue que cette centrifugation exposera le prélèvement à une action encore plus dramatique de l'oxygène (effet néfaste sur les anaérobies) et augmente les manipulations
au laboratoire (risques de contamination).On pratiquera :
* Un ensemencement large d'un bouillon de culture riche (type coeur-cervelle) incubé en
aérobiose observé journellement, conservé à 37 ° (4 jours en moyenne et pour les liquide
articulaires 10 jours)
* Un ensemencement d'un bouillon pour anaérobies.
* Des isolements aérobies sur :
- gélose au sang;
- milieu sélectif pour bactéries à Gram négatif;
- gélose chocolat incubée en atmosphère de C02 à 35'C (selon le contexte gélose BCYEalpha
Legionella , si corynéformes à l'examen direct: milieu au Tween);
* Un isolement en anaérobiose sur gélose au sang préréduit;
En fonction du contexte clinique (immunodéprimé, antécédents de tuberculose), milieu de Sabouraud
pour levures, Aspergillus (incubé entre 22 ° C et 30 ° C) et milieux de cultures pour Mycobacterium
(conservés 8 semaines) et Nocardia (1 0 jours).
3 - Interprétation des cultures
Il faut mettre en parallèle le résultat des cultures aérobie et anaérobie.
Les milieux solides sont examinés au bout de 24 et 48 heures. Les bouillons seront conservés.
Le résultat n'est considéré négatif qu'au delà du 10 ième jour en particulier pour les liquides de ponction articulaire.
Pour les liquides articulaires, un résultat posiytif est très en faveur d'une infection; en revanche, un résultat négatif ne l'exclut pas car il peut exister dans ce site des bactéries en faible quantité, quiescentes ou non cultivables. Pour les autres prélèvements, l'interprétation est souvent plus aisée.
Dans tous ces sites, y compris dans le liquide péritonéal où il peut y avoir un envahissement polymicrobien, l'identification de l'ensemble des espèces bactériennes isolées est recommandée.
Toutefois, la présence d'une culture mixte (plus de trois espèces bactériennes, aucune n'étant prédominante)
amène à discuter l'identification précise de toutes les espèces isolées et doit conduire à une confrontation avec la
clinique avant de pousuivre en conservant les souches.
4 - Sensibilité aux antibiotiques
La détermination systématoque de la CMI ou des CMIs des molécules utilisées dans le traitement
( telle que le recommande la nomenclature du 30 juillet 1997 ) semble excessive.
Bibliographie
Processing and interpretation of sterile body fluids :
Clinical Microbiology Procedures Handblook -
Vol. 1 - H.D. ISENBERG, A.S.M. Washington DC 1992.
FLANDROIS J.P., CIIOMARAT M. -
L'examen bactériologique des liquides de drainage non purulents -
In : Bactériologie Médicale Pratique - Medsi / Mc Graw - Hill, Paris 1988.
MURRAY P.R. and coll. Manual of Clinical Microbiology. 6th ed. ASM Press, Washington DC 1995.