CHAPITRE 9
Communication chimique


4. Mode d'action des hormones et des modulateurs locaux

4.1. Généralités introductives

4.2. Action via récepteurs intracellulaires

4.2.1. Localisation - mode d'action
4.2.2. Caractéristiques et structures
4.2.3. Spécificité des effets

4.3. Action via récepteurs membranaires

4.3.1. Généralités introductives
4.3.2. Récepteurs couplés à des protéines G - Système RCPG et seconds messagers

a. les récepteurs
b. les protéines G
c. les systèmes enzymatiques amplificateurs et les seconds messagers

4.3.3. Récepteurs couplés à des tyrosines kinases cytoplasmiques - Système RCTK
4.3.4. Récepteurs à activité tyrosine kinase - Système RATK
4.3.5. Récepteurs à activité autre que tyrosine kinase

4.4. Cnst_ico.gif (1067 octets)

4.1. Généralités introductives

Les modulations d’activité induites par les sémiomolécules envisagées dans ce chapitre font intervenir un transfert d’information du milieu extracellulaire vers le milieu intracellulaire. La première étape de ce transfert fait toujours intervenir une association avec un récepteur spécifique. Aucune des sémiomolécules considérées ici  n’agit en effet directement sur les systèmes effecteurs des cellules-cibles (enzymes, transporteurs, canaux, gènes). Les récepteurs impliqués sont membranaires lorsque les molécules passent difficilement la membrane plasmique (hormones et parahormones peptidiques, cytokines, prostanoïdes). Ils sont intracellulaires pour les molécules plus lipophiles et dont la perméabilité membranaire est plus élevée (hormones stéroïdes) ou encore pour les molécules endocytées (hormones thyroïdiennes iodées). La distinction n'est toutefois pas toujours aussi nette, on trouve en effet des récepteurs cytoplasmiques pour différents modulateurs dont les effets majeurs font intervenir des récepteurs membranaires. De même, différentes hormones stéroïdes ont, à côté de récepteurs intracellulaires, des récepteurs membranaires. Le rôle de ces récepteurs "secondaires" reste en général peu clair jusqu'à présent : ils ne seront donc pas considérés plus en détail ici.

En général, les récepteurs intracellulaires activés peuvent moduler directement l’activité de leurs systèmes-cibles. La modulation par récepteur membranaire doit par contre faire intervenir une cascade de signalisation permettant le transfert du message de la membrane au site intracellulaire du système-cible. Envisageons maintenant rapidement ces différents mécanismes.

4.2. Action via récepteurs intracellulaires

4.2.1. Localisation - mode d'action
Les hormones stéroïdes ou thyroï­diennes forment avec leurs récepteurs intracellulaires des complexes qui, d'une façon encore mal connue, vont activer la synthèse de différentes protéines au niveau génique. Ils sont essentiellement localisés dans le noyau des cellules-cibles et leur effet majeur paraît se situer au niveau d’une régulation de la transcription des gènes (figure 9-29). Il paraît cependant clair que d'autres processus, comme par exemple une modulation de l’activité translationnelle pourraient également être impliqués. Des effets non géniques peuvent par ailleurs être pris en considération dans certains cas, tels que modification de dégradation ou de stockage de la protéine, modification d'activité par phosphorylation ou glycosylation.

Le schéma le plus communément admis à l'heure actuelle considère que l'essentiel des récepteurs inactifs se trouve au niveau du noyau, associé à des protéines non-histoniques de la chromatine. L'association avec l'hormone libère le récepteur et le complexe HR actif peut se fixer à un élément de la région régulatrice (5'-flanking) d'une unité de transcription, participant ainsi, éventuellement avec d'autres éléments modulateurs, à son activation ou au contrôle de sa vitesse de transcription (figure 9-29). Ce modèle général parait valable à la fois pour les hormones stéroïdes et les hormones thyroïdiennes. Une exception a toutefois été clairement décrite à ce jour ; il s'agit de l'élément régulateur glucocorticostéroïde du gène de l'hormone de croissance qui parait situé sur le premier intron de l'unité structurale et non dans la région régulatrice.

Figure 9-29 (15957 octets)

Figure 9-29 : Représentation schématique du rôle des récepteurs intracellulaires dans le mode d'action des hormones stéroïdes. H : hormone, Rec : récepteur, HSP90 : protéine associée au Rec bloquant son association à l'ADN. Le complexe hormone-récepteur une fois libéré du HSP90 peut se lier à un élément de réponse hormonal (HRE) se trouvant sur la région 5' régulatrice d'une unité transcriptionnelle. Cette liaison déterminera, avec l'activation éventuelle d'autres éléments de réponse (RE), la vitesse de transcription d'une série de gènes de structure. P : promoteur TATA. Détails dans le texte.

4.2.2. Caractéristiques et structures
Les récepteurs aux hormones stéroïdes et thyroïdiennes paraissent appartenir à une même grande famille. On en a proposé un classement en 6 catégories sur base des spécificités de leur liaison avec différents ligands : hormones, agonistes et antagonistes. Nombre d'entre eux ont maintenant été identifiés chez les mammifères et clonés ; l'étude de leur séquence a permis de les grouper en deux classes : les récepteurs de classe 1 comprenant les récepteurs aux stéroïdes des surrénales (gluco et minéralocorticoïdes) ainsi que les récepteurs à la progestérone et ceux aux androgènes - les récepteurs de classe 2 comprenant les récepteurs aux œstrogènes et ceux aux hormones thyroïdiennes.

Les récepteurs aux stéroïdes ont été les plus étudiés. Ils ont des structures très proches avec, notamment des sites de liaison à l'ADN comportant deux complexes de coordination de type "doigt de zinc". Ils se présentent sous forme de gros hétéro-oligomères comprenant des sous-unités protéiques associées à une unité de type HSP 90 inhibant leur association au site de liaison de l'ADN. La liaison hormone-récepteur induit le relarguage de cette unité (figure 9-30).

Figure 9-30 (11966 octets)

Figure 9-30 : A : Représentation schématique d'un récepteur à hormone stéroïde. Ces récepteurs se présentent tous sous la forme d'hétéro - oligomères paraissant associés à une protéine de type HSP90 (Heat Shock Protein - voir aussi chapitre 12) qui empêche l'association du récepteur non activé avec l'ADN. La liaison de l'hormone au récepteur permet cette association en libérant le HSP90. B : Structure linéarisée du récepteur à l'œstradiol humain, un ensemble de 595 acides aminés avec des domaines centraux C et D contenant le site de liaison à l'ADN et un domaine C-terminal E contenant le site de liaison du ligand. Ce site parait consister en un ensemble de 12 structures a hélicoïdales formant une cavité au niveau de laquelle les interactions entre œstradiol, Glu 353, Arg 394 et His 524 jouent un rôle essentiel dans la liaison (voir Brzozowski et al., Nature 387, 753, 1997). Ce type de structure parait général au niveau des récepteurs à hormone stéroïde. C : Les sites de liaison à l'ADN paraissent également de structure très proche au niveau des différents récepteurs. Ils présentent deux complexes de coordination formant des doigts de zinc qui jouent vraisemblablement un rôle important dans la liaison du récepteur activé à son élément de réponse sur l'ADN. La partie C de la figure compare les sites de liaison à l'ADN pour les récepteurs à l'œstradiol, à la progestérone et au corticostérol. Les acides aminés communs aux différents récepteurs sont représentés par l, les autres par n.

4.2.3. Spécificité des effets
Il ne paraît pas y avoir de mécanisme de transport transmembranaire spécifique aux hormones stéroïdes ou thyroïdiennes. Par ailleurs, la perméabilité des cellules-cibles à ces hormones ne paraît pas particulièrement élevée. Elles diffusent donc dans tous les types cellulaires ; la capacité de réponse spécifique des cellules-cibles dépend en fait de la présence de récepteurs dans les cellules plutôt que de l'accessibilité de ces cellules à l'hormone.

La spécificité d'effets en fonction du type de cellule-cible paraît, elle, liée à des différences dans les unités de transcription activées plutôt qu'à l'existence de différents types de récepteurs activant chacun des unités données. Ainsi par exemple, les récepteurs aux glucocorticoïdes ou à la testostérone sont les mêmes dans les différents types de cellules-cibles. La similitude des récepteurs peut rendre compte du syndrome de féminisation testiculaire observé chez de nombreux mammifères au niveau desquels aucun des caractères sexuels mâles n'apparaît bien que les testicules soient présents et sécrètent de la testostérone en quantité suffisante. L'anomalie réside ici en un défaut de synthèse du récepteur ; il en résulte des individus génétiquement mâles mais au niveau desquels l'expression phénotypique de l'ensemble des traits masculins est bloquée par manque du récepteur requis.

En général, l'activation d'un système récepteur module la transcription de quelques dizaines à quelques centaines de gènes, le plus souvent semble-t-il en un système de cascade. De ce cadre, une activation "primaire" porte sur un petit nombre de gènes et induit la production de quelques protéines modulatrices qui vont elles-mêmes activer, dans une réponse "secondaire", d'autres unités transcriptionnelles. Ainsi par exemple, l'hormone de mue de la drosophile provoque, dans les 10 minutes suivant son injection, l'apparition de 6 nouveaux sites de synthèse de RNA sur les chromosomes géants. Après délais, on constate l'apparition de plus de 100 autres sites ; l'ensemble aboutissant à la formation de très nombreuses architectures protéiques nouvelles.

Au niveau des cellules animales, l'organisation en opérons présente chez les bactéries n'existe pas ; les séquences codant pour différentes unités d'une même structure protéique peuvent même se trouver sur des chromosomes différents (hémoglobine par exemple). Il doit donc exister un mécanisme sélectionnant les unités de transcription à activer en fonction des effets à obtenir. On ne connaît à l'heure actuelle pratiquement rien des facteurs qui pourraient déterminer la "compétence" des gènes devant être régulés dans un cadre donné. Il semble que le jeu de différents facteurs de transcription intervenant non seulement au niveau des segments régulateurs mais aussi au niveau des introns doive être pris en considération. Les segments de DNA ainsi impliqués dans ce cadre pourraient soit activer la transcription de certains gènes (''enhancer segments") soit encore la bloquer ("silencer segments").

4.3. Action via récepteurs membranaires

4.3.1. Généralités introductives
La majeure partie des sémiomolécules envisagées jusqu'ici font intervenir des récepteurs membranaires. Ces récepteurs occupent donc une place essentielle dans les systèmes de signalisation intercellulaires. Ils présentent tous certaines caractéristiques communes, notamment : un domaine extracellulaire pouvant fixer spécifiquement le modulateur et un domaine membranaire intervenant dans la transduction du signal du milieu extracellulaire au milieu intracellulaire. Dans la plupart des cas, on trouve également un domaine intracellulaire assurant la transmission du signal à un ou plusieurs systèmes effecteurs ; cette transmission fait généralement intervenir une cascade plus ou moins longue des systèmes relais kinasiques ou phosphatasiques.

On regroupe habituellement les récepteurs membranaires en cinq catégories :
    - les récepteurs dont l'organisation structurelle forme un canal.
    - les récepteurs couplés à des kinases de signalisation intracellulaires par l'intermédiaire de protéines dites G.
    - les récepteurs couplés directement à des enzymes cytoplasmiques de signalisation.
    - les récepteurs possédant une activité enzymatique propre, généralement de type kinasique ou phosphatasique.
    - les récepteurs du type anticorps du système immunitaire.

Les récepteurs de type anticorps sont spécifiques au système immunitaire ; ils seront donc envisagés au chapitre 10 traitant des mécanismes de défense.

Les récepteurs "canaux" interviennent essentiellement dans la transmission de signaux relatifs à la modulation du potentiel de membrane et à sa propagation au niveau synaptique. Ils sont donc considérés au chapitre 8 traitant des relations nerveuses.

Les trois autres catégories de récepteurs interviennent dans la transmission de nombreux messages hormonaux, parahormonaux ou relevant de modulateurs locaux qui nous intéressent ici. Envisageons-les donc rapidement de manière successive.

4.3.2. Récepteurs couplés à des protéines G - Système RCPG et seconds messagers
Le système RCPG est impliqué dans la transmission au niveau intracellulaire des messages de très nombreux modulateurs : hormones peptidiques (mis à part l'insuline, cfr. 4.3.4, l’hormone de croissance et la prolactine, cfr.4.3.3), catécholamines, prostaglandines, leucotriènes et autres eicosanoïdes ainsi que différentes cytokines.

Il est probablement le système le mieux connu à l'heure actuelle, ayant servi dans les années 50 de premier modèle d'étude concernant la transmission d'un signal hormonal. Il s'agissait en fait de l’étude des effets de la noradrénaline sur la glycogénolyse au niveau de cellules hépatiques (cfr. 2.3.4 et 4.4…). Ces recherches ont permis à Sutherland, leur auteur, de développer le concept de "second messager" qui lui valu le prix Nobel de Médecine en 1960. Dans ce système, l'activation d'un récepteur membranaire par un "premier messager" (la noradrénaline) induit dans le cytoplasme des cellules-cibles la production d'un "second messager" qui à son tour va activer différents processus intervenant dans l'effet de l'hormone. Le second messager intervenant dans le cas présent est l'AMP cyclique (AMPc). On en a depuis lors découvert plusieurs autres ; leur production fait chaque fois intervenir une protéine membranaire dite de type G ; ainsi nommée parce qu'un nucléotide guanylique, le GTP, participe à son activation (voir plus loin et figure 9-31).

Le système RCPG concerne donc une séquence de transduction d'un message véhiculé dans le milieu extracellulaire par un modulateur "premier messager" vers le milieu intracellulaire et comprenant : 1) la liaison du ligand (modulateur) à son récepteur spécifique. 2) L'activation d'une protéine G. 3) L'activation d'un système enzymatique effecteur impliqué dans la production du "second messager" (figure 9-31).

Le système enzymatique effecteur des protéines G est parfois appelé amplificateur puisqu'en fait son activation à partir d'un seul complexe ligand-récepteur aboutit à la formation de nombreuses molécules de second messager, amplifiant donc en quelque sorte le signal de départ. Dans certains cas, comme nous le verrons par la suite, la liaison ligand-récepteur aboutit à une inhibition de l'activité du système amplificateur au lieu d'une stimulation. Il y a donc dans ces conditions une diminution de la quantité de second messager au lieu d'une augmentation (figure 9-31).

Figure 9-31 (7997 octets)

Figure 9-31 : Le système de signalisation RCPG et la formation des "seconds messagers". Détails dans le texte. R : récepteur spécifique à un premier messager ; PGs, PGi : protéine G stimulatrice ou inhibitrice (cette dernière dans certains cas seulement) ; SA : système enzymatique amplificateur ; PK : Kinase de protéine ; Ca2+ : Calcium.

Les différents second messagers produits vont induire des effets physiologiques par l'intermédiaire d'une modulation 1) de l'activité de différentes kinases, enzymes activant ou inhibant par phosphorylation une variété de protéines présentant des activités biologiques (enzymes, canaux, transporteurs) ou encore 2) de la concentration en calcium intracellulaire, variation induisant à son tour une modulation de l'activité de différentes protéines.

Envisageons maintenant de manière un peu plus détaillée les différentes composantes du système RCPG.

a. les récepteurs
Les récepteurs du système RCPG constituent sans nul doute la famille la plus nombreuse des récepteurs membranaires. Ils restent à l'heure actuelle loin d'être tous complètement caractérisés mais les données obtenues jusqu'à présent montrent qu'ils présentent tous des caractéristiques structurales fondamentales communes à côté des spécificités de configuration nécessaires notamment à la liaison avec un modulateur donné. Ils sont en effet tous constitués d'une seule chaîne polypeptidique possédant 7 segments transmembranaires en hélice a (figure 9-32). L'extrémité N-terminale est localisée dans le milieu extracellulaire et porte des sites de glycosylation. L'extrémité C-terminale est cytosolique et présente des sites de phosphorylation. La boucle cytoplasmique C3 parait être un élément clef dans l'interaction avec les protéines G.

Contrairement à ce que l'on aurait pu imaginer, de nombreux ligands de petite taille ne se fixent pas sur la partie N-terminale, aisément accessible dans le milieu extracellulaire, mais plutôt entre les hélices transmembranaires. L'encombrement stérique des ligands de grande taille empêche ce type de fixation qui implique alors soit les boucles extramembranaires de la partie N-terminale, soit l'interface entre ces boucles et la membrane.

Le rôle des récepteurs RCPG est en définitive triple : 1) ils fixent spécifiquement un modulateur donné, 2) ils transmettent le signal au sein de la membrane, 3) ils interagissent avec des protéines G permettant ainsi la production de seconds messagers.

Figure 9-32 (12414 octets)

Figure 9-32 : Topologie proposée pour les récepteurs de la famille RCPG.

b. les protéines G
Les protéines G interagissent avec les récepteurs RCPG au niveau de la face cytoplasmique de la membrane. Il s'agit d'une interaction très spécifique, un récepteur donné activant une protéine G donnée. Il y a donc de très nombreuses protéines G. Elles se présentent toutes comme des hétérotrimères comportant 3 sous-unités : a , b et g . On les distingue essentiellement par la nature de leurs sous-unités a , beaucoup plus nombreuses et variées que les deux autres qui restent semblables dans de nombreux cas. La sous-unité a lie par ailleurs un nucléotide guanylique et présente une activité GTPasique qui vont jouer un rôle essentiel dans l'activation et l'inactivation des protéines G (figure 9-33).

A l'état inactif, la sous-unité a lie en fait un GDP et présente une forte affinité pour les sous-unités b et g  ; la protéine G existe donc alors sous une forme a GDP b g (figure 9-33 ). L'activation du récepteur permet la liaison de la sous-unité a avec ce dernier ; elle induit également une modification d'affinité pour le nucléotide guanylique. Le GDP est ainsi remplacé par un GTP (figure 9-33 ). A l'inverse de a GDP, a GTP présente une affinité faible pour le récepteur et pour les sous-unités b et g . Il va donc se dissocier de ses structures et pourra alors activer un système amplificateur (figure 9-33 ƒ ). a GTP restera actif tant que son activité GTPasique n'aura pas hydrolysé le GTP en GDP, restituant donc la forme a GDP qui se réassociera alors avec les sous-unités b et g et ensuite avec un nouveau récepteur activé pour recommencer un cycle (figure 9-33 ).

Le récepteur resté actif lors du départ de a GDP peut de son côté fixer un nouveau complexe inactif a GDP b g pour démarrer un autre cycle. On voit donc, dans ce contexte, que l'amplification du signal porté par un modulateur extracellulaire a lieu en fait à deux niveaux ; tout d'abord au niveau du récepteur activé qui peut activer de nombreuses protéines G les unes à la suite des autres ; ensuite au niveau de la sous-unité a GTP qui peut maintenir le système amplificateur activé tant que le GTP n'est pas hydrolysé en GDP (figure 9-33).

Figure 9-33 (11511 octets)

Figure 9-33 : Cycle d'activation et inactivation des protéines G dans la transmission du signal d'un récepteur RCPG à un système amplificateur. L : ligand (modulateur) ; R : récepteur ; a, b, g : sous-unités d'une protéine G. Détails dans le texte.

c. les systèmes enzymatiques amplificateurs et les seconds messagers
L'activation des protéines G conduit à la modulation de l'activité de systèmes effecteurs amplificateurs (enzymes ou canaux) aboutissant à une modification de concentration de messagers intracellulaires (seconds messagers). Avant d'envisager plus en détail ce système, rappelons que les mécanismes intervenant dans le contrôle de canaux ioniques en rapport avec la génération de potentiels d'action ou de jonction sont envisagés au chapitre 8 traitant du système nerveux.

Les messagers les plus connus à l'heure actuelle sont soit des nucléotides cycliques (AMPc et GMPc) soit des dérivés de certains lipides membranaires : diacylglycérol (DAG) et inositol triphosphate (IP3), dérivés du phosphoinositol biphosphate - lysophospholipides dérivés de la phosphatidylcholine. Les enzymes impliqués dans leur formation sont respectivement des adénylyl-cyclases pour l'AMPc, des guanylyl-cyclases pour le GMPc, des phospholipases C pour l'IP3 et le DAG et des phospholipases A2 pour les lysophospholipides (figure 9-34). L'activation de phospholipases D peut également produire du DAG à partir de phosphatidylcholine membranaire (voir plus loin).

Les cibles intracellulaires directes de ces seconds messagers ne sont pas encore toutes clairement définies. Signalons simplement ici les protéines kinases A, G et C, sensibles respectivement à l'AMPc, au GMPc et au diacylglycérol. L'IP3 agira lui en induisant une mobilisation du Ca2+ à partir des réserves du réticulum endoplasmique. Il active en fait l'ouverture de canaux à Ca2+ au niveau de ces structures, favorisant ainsi sa libération et son accumulation dans le cytoplasme. Le Ca2+ peut donc être considéré comme une sorte de "troisième messager" ; il agira soit directement sur l'activité de différents systèmes effecteurs soit via différents types de protéines fixant le Ca2+ (voir plus loin et figure 9-34).

Figure 9-34 (15207 octets)

Figure 9-34 : Les systèmes enzymatiques amplificateurs, les "seconds" et "troisièmes" messagers. Les phospholipases A2 sont activées en présence de Ca2+ ; elles s'associent alors à la membrane pour produire des lysophospholipides à partir de phosphatidylcholine membranaire. DAG : diacylglycérol ; G : protéine G ; IP3 : inositol triphosphate ; L : ligand (modulateur) ; PC : phosphatidylcholine ; Pi P2 : phosphatidylinositol-biphosphate ; PK : Kinases de protéines. Détails dans le texte.

La régulation de la concentration intracellulaire en second messager peut mettre en jeu non seulement l'activité des systèmes enzymatiques amplificateurs responsables de leur synthèse mais encore l'activité des systèmes responsables de leur dégradation. Dans ce cadre, la dégradation des nucléotides cycliques AMPc et GMPc fait intervenir des phosphodiestérases qui les décyclisent en nucléotides 5' correspondants (figure 9-35). On ne connaît à l'heure actuelle que très peu de choses concernant la régulation de ces voies métaboliques. Rappelons, par ailleurs, que, dans le cas particulier de l'adénylyl-cyclase, il existe des protéines G (Gi) qui sont inhibitrices de l'activité de l'enzyme et qui vont donc induire une diminution de la teneur en AMPc. Rappelons également que le DAG peut être produit suite à activation de phospholipases C ou D. Comme le montre la figure 9-36, cette production est nettement plus lente lors de l'activation de la phospholipase D. Les deux types de production du DAG interviennent donc vraisemblablement dans des types de régulations différents.

Figure 9-35 (16605 octets)

Figure 9-35 : Principaux seconds messagers et voie de synthèse.

 

Figure 9-36 (7566 octets)

Figure 9-36 : A : Evolution du diacylglycérol (DAG) et de l'activité de la PKC suite à activation de phospholipases C (———, DAG produit à partir de PIP2 ) ou de phospholipases D (———, DAG produit à partir de PC). B : L'activation des phospholipases C induit également une augmentation rapide du Ca++ (via IP3 ) responsable d'une activation des phospholipases A2 et d'une augmentation lente des lysoPC.

Quelques exemples de régulation impliquant certains des seconds messagers considérés ci-dessus seront envisagés dans la section suivante (4.4).

4.3.3. Récepteurs couplés à des tyrosines kinases cytoplasmiques - Système RCTK
Cette catégorie de récepteurs intervient essentiellement dans la transmission des messages des interleukines, des interférons et autres cytokines en général mais aussi de l'hormone de croissance et de la prolactine par exemple.

Les récepteurs RCTK exercent leurs effets par l'intermédiaire de protéines cytoplasmiques qui leurs sont associés et qui possèdent une activité tyrosine kinase. Ils sont constitués de chaînes polypeptidiques n'ayant qu'un seul segment transmembranaire. Leur activation par fixation du ligand induit en général une dimèrisation (parfois une oligomèrisation) de chaînes induisant à son tour une activation des tyrosines kinases associées (figure 9-37).

Les types de tyrosines kinases associées sont nombreuses et varient avec le récepteur considéré. Les plus connues à l'heure actuelle sont JACK 1, 2 et 3 ou encore TYK2. L'activité de ces enzymes induit la phosphorylation d'autres protéines qui leurs servent de substrat. Parmi celles-ci, citons les STATs (Signal Transducer and Activator of Transcription) qui sont des facteurs importants dans les régulations de transcription impliquées dans les effets physiologiques de nombreuses sémiomolécules (figure 9-37).

Figure 9-37 (9225 octets)

Figure 9-37 : Activation et transmission du signal au niveau des récepteurs RCTK. La liaison du ligand (L) induit une dimèrisation d'un récepteur (R) avec activation d'une protéine associée (PA, ici JACK). La tyrosine kinase est ainsi phosphorylée et peut phosphoryler une protéine substrat (ici STAT).

4.3.4. Récepteurs à activité tyrosine kinase - Système RATK
Dans ce système, la fixation du ligand induit une activité tyrosine kinase dans le domaine intracellulaire du récepteur avec pour conséquence une autophosphorylation des tyrosines de la chaîne. Différentes protéines-cibles pourraient alors être phosphorylées et induiraient une activité biologique (figure 9-38).

Font partie de ce système les récepteurs activés notamment par l'insuline et une série de facteurs de croissance (EGF : epithelial growth factor – FGF : fibroblast growth factor – NGF : nerve growth factor – PDGF : platelet derived growth factor – VEGF : vascular endothelial growth factor).

Les récepteurs RATK sont constitués d'une seule chaîne polypeptidique transmembranaire (pour les facteurs de croissance) ou de deux chaînes (pour l'insuline). L'extrémité N-terminale, extracellulaire, de la chaîne est en général glycosylée et peut comporter plusieurs domaines différents. L'extrémité C-terminale est intracellulaire et porte l'activité catalytique.

La fixation du ligand entraîne une dimèrisation des récepteurs monomèriques. Cette étape n'intervient pas au niveau des récepteurs déjà dimèriques comme celui de l'insuline par exemple. La liaison ligand-récepteur induit un changement de structure des domaines cytoplasmiques qui permet l'activation des tyrosines kinases. Il en résulte une phosphorylation croisée des deux chaînes, le domaine cytoplasmique d'une chaîne phosphorylant l'autre. Ces phosphorylations induisent l'apparition de sites à haute affinité pour des protéines substrats. Elles sont alors phosphorylées ce qui active leurs propres activités biologiques (cfr. exemples dans la section 4.4).

L'inactivation du système fait semble-t-il intervenir une internalisation par endocytose. Les récepteurs sont ainsi incorporés dans des vésicules d'où ils peuvent être recyclés après dissociation du ligand.

Figure 9-38 (13050 octets)

Figure 9-38 : Activation et transmission du signal au niveau des récepteurs RATK. La liaison du ligand (L) au récepteur (R) conduit à une dimèrisation dans le cas des récepteurs monomèriques (celui du facteur de croissance par exemple). Certains récepteurs sont au départ dimèriques ; celui de l'insuline comporte deux sous-unités a extracellulaires, liées à deux sous-unités b transmembranaires par des ponts disulfures. L'autophosphorylation croisée des domaines catalytiques intracellulaires permet l'activation par phosphorylation de protéines substrats (PS) ayant diffé-rentes activités biologiques. Détails dans le texte.

4.3.5. Récepteurs à activité autre que tyrosine kinase
Sont repris dans ce cadre général les récepteurs à activité sérine/thréonine kinase comme ceux des TGF (transforming growth factors), les récepteurs à activité histidine kinase ainsi que les récepteurs à activité tyrosine phosphatase de type CD. Ces dernières paraissent intervenir essentiellement dans la transmission de signaux immunitaires dans les lymphocytes B et T. Ils seront considérés brièvement au chapitre 10.

Le mécanisme d'activation des récepteurs des TGF est complexe et loin d'être clairement défini. Il ferait intervenir en cascade 3 types de récepteurs différents (fig.9-39). Le ligand se fixerait d'abord sur un récepteur de type III, ce qui permettrait son transfert successivement sur un récepteur de type II puis sur un récepteur de type I possédant une activité kinasique mais incapable de fixer directement le ligand. L'activité kinasique serait induite par phosphorylation de résidus sérines du récepteur I par le récepteur II suite à un phénomène de recrutement. L'activité kinasique du récepteur I serait responsable de la phosphorylation de constituants cytoplasmiques à effets biologiques (fig. 9-39).

Figure 9-39 (11441 octets)

Figure 9-39 : Mécanisme possible d'activation et de transmission du signal au niveau des récepteurs à activité sérine/thréonine kinase. Détails dans le texte.

4.4. Cnst_ico.gif (1067 octets)

 
 

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